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Moz'Art

Retroscpective Mocong au Griot

Exposition de peintures phares du travail artistique de Simon Mocong né à Malabo (Guinée Equatoriale).
  • Retroscpective Mocong au Griot
Genre : Exposition

Du vendredi 09 mai au lundi 09 juin 2008

Horaires : 00:00
Pays principal concerné : Rubrique : Arts plastiques

Au départ, on se dit qu'il y a forcément une histoire d'appartenance. Pour cette nouvelle exposition au Griot, qui se veut un retour sur son travail, Simon MOCONG (né à Malabo dans les années soixante-dix) a choisi de faire référence à un retour aux sources de l'africanité, une manière de voyage imaginaire vers les origines. Sous l'évidence du propos, cette "traversée" indique une démarche à la fois tribale et singulière, celle qui consiste à renouer avec un horizon oublié et une culture collective. Car ces toiles relèvent à la fois du travail de mémoire, celle des ancêtres, et de la redécouverte d'une dimension de soi perdue de vue dès l'enfance, jamais tout à fait écartée pour autant. C'est sans doute la douleur provoquée par ce déracinement inaugural qui travaille sa démarche.

L'univers personnel du peintre passe, on l'aura compris, par l'Afrique et en réfère aussi bien aux lignes simples d'objets totémiques, qu'à des situations quotidiennes plus triviales, des épiphanies colorées que le regard saisit au détour d'une vision marquante. Parfois, c'est la réflexion sociale, plus polémique, travaillée par les ambiguïtés de l'engagement politique, qui prend le dessus (Retrato del político africano). Pas de revendication intempestive d' "africanité" ou de "négritude" à proprement parler (les termes ne sont-ils pas galvaudés d'ailleurs depuis que Senghor leur a donné une assise), mais de constantes références sociales, un jeu subtil sur les origines qui redéfinissent à chaque toile ces représentations trop souvent chargées de détournements exotiques ou d'amalgames rituels encombrants.

Le parcours artistique de Simon MOCONG a commencé par pratiquer le tag, comme une manière radicale de s'approprier l'espace urbain pour le sublimer à sa manière. Revendiquer l'espace public, qu'il soit mur, bâtiment, fresque ou toile, est le propos essentiel que l'on retrouve en particulier dans les grands formats des dernières années. De son adolescence espagnole à Madrid, a surgi une forme de rage contestataire. La formation picturale a suivi, plus académique, en Suisse et en Italie. Elle a permis de cristalliser ces essais inauguraux placés sous le signe de la révolte symbolique. De cette fusion entre démarche ethnique, représentation urbaine et technique occidentale classique a surgi cette perception inédite propre au bourlingueur apatride en quête de sens. Si Simon MOCONG se revendique aussi bien des cultures urbaines que de certains peintres cubistes, ce n'est pas anodin. En ce sens, sa démarche s'apparente à une tentative de forage intérieur. Une manière d'exploration des contradictions qu'il porte en lui.

L'ensemble de l'œuvre exposée se situe à la croisée de ces univers. D'une part, elle souligne un mélange de styles et de techniques (acryl, huile, encre de chine, collages, matériaux bruts) propre aux arts plastiques occidentaux ; d'autre part, elle s'ancre dans une tradition culturelle tournée vers le rite et la célébration animiste (sculpture sur bois, ornementation) qui se résout dans une tension constante entre le figuratif et l'espace abstrait, le sacré et le profane.

La plupart des toiles reposent sur le réinvestissement affectif de matériaux signifiants dans un cadre à la fois rêvé et plausible : Afrique transcendée par la couleur, Malabo sous la lumière, rêve insulaire, mythe biblique détourné, manifestation animiste. Autant de facettes d'une (re)découverte avec sa part de fascination et d'incompréhension. Projetés hors de leur cadre de référence, les masques tribaux Fang et autres figures anthropomorphes qui inspirent une partie de ces créations revêtent un caractère d'étrangeté. Ils reflètent une ambivalence : proximité et distance ; étrangeté et familiarité. On devine d'ailleurs que leur auteur joue ici avec son propre état civil, l'identité profonde et problématique du déraciné. Le tableau devient l'espace inédit d'une rencontre, un lieu de passage. Le masque ou le portrait des substituts de visage.

On retiendra, dans cette production, le travail issu du récent voyage de retour en Guinée-Équatoriale. Ainsi la fréquentation de la terre des ancêtres est-elle l'occasion d'un renouement essentiel. Le peintre y puise des images fortes qu'il réinvestit d'abord dans Au fond des sources, éclatement chromatique fulgurant, travail inaugural de cette nouvelle période, son tableau le plus intime peut-être. À partir de là, la peinture n'est plus envisagée seulement comme une simple recherche formelle, mais bien comme une tentative de revendication identitaire. Le principe de réalité auquel s'est heurté Simon MOCONG a changé sa perception. On peut parler d'étape fondatrice. Sa démarche s'ancre désormais dans la transmission. La toile peut enfin faire le lien entre la diaspora et le peuple resté sur place. Plus d'idéalisation donc, mais une fascination toujours aussi marquée pour les formes singulières qui se dérobent, les idéogrammes réinventés et les objets totémiques détournés.

Lieu d'une transaction inédite, la toile peut enfin se donner à voir telle qu'en elle-même, elle joue de cette ambiguïté identitaire. Elle questionne le rapport à l'autre part de soi-même demeurée là-bas, semblable et pourtant si différente. "Farafin" (littéralement "peau noire") a mué sans pour autant changer de peau. Cette rétrospective est une façon de fermer un cycle fécond et d'ouvrir une nouvelle période.


Angel Corredera

Renseignements / Lieu


http://www.legriot.ch



( 2008-05-09 00:00:00 > 2008-06-09 00:00:00 )
rte/Rue de Lausanne 53
renens ( 1020 )
Suisse




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